Elizabeth George, Anatomie d'un crime
Les héros habituels d'Elizabeth George, le commissaire Lynley et Barbara Havers, sont absents de ce nouveau livre. Pourtant, le crime dont la genèse nous est méticuleusement décortiquée est celui de la belle Lady Helen Lynley, enceinte et heureuse, abattue devant sa porte, à Belgravia, dans Sans l'ombre d'un témoin.
Les enfants Campbell sont trois : Vanessa est une adolescente paumée, rebelle et violente qui se détruit lentement, entre drogue, vol et prostitution. Joël a 12 ans et rêve de devenir psychiatre. Bon élève, honnête et généreux, poète en herbe, il tente vainement de survivre dans la jungle urbaine impitoyable. Toby le petit dernier, souffre d'un retard mental. Innocent, fragile, il s'est construit un monde à part peuplé de personnages imaginaires, il dépend de son grand frère pour le protéger de la haine des petits caïds qui le persécutent. Leur père a été tué dans la rue au cours d'un règlement de compte, leur mère est internée dans un hôpital psychiatrique. Abandonnés par leur grand-mère, ces trois enfants vivent dans un quartier misérable avec leur tante, Kenza, une quadragénaire qui essaie maladroitement d'assumer son rôle maternel.
L'engrenage dans lequel les trois enfants sont aspirés est longuement démonté par Elizabeth George. La tension monte, on sent qu'un drame est inévitable, on se prend à espérer, on s'attache à Joël, on l'aime, on voudrait le sauver, le sortir de là ! Peine perdue...
Violent, nerveux, très noir, le récit suit son cours, implacable. 500 pages d'une descente aux enfers, dans un univers désespérant peuplé de personnages habilement décrits ... Yvan, le prof qui tente d'arracher Joël à son destin par l'amour des mots et de la poésie, Majidah la gentille pakistanaise qui parvient presque à briser les défenses de Vanessa, Dix, le jeune ami culturiste de Kenza, "La Lame" redoutable délinquant qui règne en maître sur le quartier, probablement indic, jouissant de l'impunité et de la protection de la police.
Un gros roman très dense et solidement construit, qui ne remonte pas le moral mais se lit d'une traite.